vendredi 17 février 2012

Le président allemand démissionne


Le président allemand démissionne

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Par Patrick Saint-PaulMis à jour  | publié  Réactions (147)
Le président allemand, Christian Wulff, en septembre 2010.
Le président allemand, Christian Wulff, en septembre 2010. Crédits photo : Michael Sohn/AP
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Le parquet de Hanovre, qui enquête sur un scandale immobilier, a demandé jeudi soir au Bundestag de lever l'immunité de Christian Wulff. Merkel gère ce coup de tonnerre de façon habile.

De notre correspondant à Berlin
Le président allemand, Christian Wulff, a démissionné de ses fonctions vendredi matin. Entouré de sa femme, Bettina, Wulff a prononcé une brève allocution depuis le château de Bellevue, dans laquelle il a de nouveau reconnu avoir «commis des fautes» mais clamé son innocence au regard de la justice. Cette annonce faisait suite à la demande de levée de son immunité parlementaire, réclamée jeudi soir par le parquet de Hanovre. La chancelière, qui a annulé un voyage en Italie, doit s'exprimer dans la matinée.
«Un président doit être porté non seulement par la confiance d'une majorité, mais aussi par celle d'une très large majorité d'Allemands, a expliqué Christian Wulff. Les développements des dernières semaines ont irrémédiablement porté atteinte à cette confiance. C'est pourquoi j'ai pris la décision de me retirer». Depuis une dizaine de jours, une écrasante majorité d'Allemands se disait favorable à son départ, selon plusieurs sondages.
Le coup de grâce est venu jeudi soir, lorsque le parquet de Hanovre avait déclaré avoir à l'encontre de Wulff un début de suspicion dans un scandale ayant trait à un prêt immobilier accordé à un taux préférentiel. «Le parquet de Hanovre a à présent suffisamment d'éléments et par conséquent un début de suspicion concernant l'acceptation de certaines faveurs, ont déclaré les procureurs dans un communiqué. Aussi a-t-il demandé au président du Bundestag de lever l'immunité présidentielle».
La chancelière abasourdie
L'opposition sociale-démocrate a immédiatement affirmée son intention de voter la levée de l'immunité. Plusieurs ténors de la majorité réclamaient sa démission. Pour les médias Wulff était est «fini politiquement». Wulff s'était excusé tardivement pour avoir induit en erreur le parlement régional de Basse-Saxe à propos d'un prêt immobilier à taux préférentiel, d'un montant de 500 000 euros, accordé par un homme d'affaires de ses amis. Ses explications n'ont pas convaincu. Selon le quotidien Bild, la chancelière, qui avait fait élire son allié conservateur à la présidence en 2010 et qui l'a soutenu depuis que les affaires ont éclaté en décembre, était abasourdie, jeudi soir.
Angela Merkel s'était entretenue longuement avec lui. Son entourage a beau clamer qu'une décision concernant une éventuelle démission reposait entièrement entre les mains de Christian Wulff, son départ ne faisait plus aucun doute. Car il devenait impossible à la chancelière de continuer à la soutenir après la décision du parquet… les affaires du président menaçant d'entacher sa propre crédibilité. Connue pour se talents de tacticienne, Merkel gère ce coup de tonnerre de façon habile. Elle a pris acte avec «un profond regret» de sa décision après lui avoir exprimé son «respect» et lui avoir rendu hommage, pour avoir «représenté avec honneur» «une Allemagne ouverte et moderne».
La chancelière a annoncé chercher avec l'opposition un candidat de consensus pour succéder à Wulff. «Nous voulons mener des discussions» avec les partis d'opposition, les sociaux-démocrates (SPD) et les Verts, «pour proposer un candidat commun pour l'élection du prochain président de la République», a dit la chancelière chrétienne-démocrate (CDU), qui un mène un gouvernement de coalition avec les Libéraux. De sa capacité à trouver rapidement un candidat de consensus dépendront les dégâts politiques provoqués par cette affaire, alors que les deux personnalités portées par Merkel à la présidence ont démissionné en l'espace de deux ans.
Les révélations se sont multipliées ces dernières semaines sur les réductions dont a bénéficié Wulff à titre personnel, en raison de son influence politique. Les Allemands ont honte de celui qui est censé incarner l'autorité morale du pays mais qui est désormais surnommé le «président ristourne». Le président s'était aussi ridiculisé en laissant un message sur la boîte vocale du rédacteur en chef du journal Bild , dans lequel il le menaçait d'une «guerre» si le quotidien à grand tirage publiait un article sur le scandale immobilier.
Il lui avait été accusé de bafouer la liberté de la presse. Il est également reproché à Christian Wulff et à son épouse Bettina de s'être fait payer un séjour sur l'île de Sylt par un producteur de cinéma, David Grönewold. Et d'avoir séjourné gratuitement chez des hommes d'affaires.