mercredi 25 janvier 2012

Après le discours de Hollande au Bourget, le PS n'a plus le droit de jouer les amateurs



Modifié le 25-01-2012 à 18h38
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LE PLUS. Au Bourget, le PS avait tout prévu, jusqu'aux caméras qui filmaient. Deux jours plus tard, le meeting de Toulon suscite beaucoup moins de réactions. Les socialistes ont élevé leurs standards, ils ne doivent désormais les maintenir explique "Le Conseiller", spécialiste en communication proche des politiques (et qui tient à garder l'anonymat).

Le meeting de François Hollande au Bourget a marqué une rupture formelle largement commentée par les observateurs et les naïfs : les images étaient fournies par le Parti socialiste, permettant ainsi d’exécuter une mise en scène étudiée de la prise de parole du candidat Hollande.

François Hollande le 24 janvier 2012 à Toulon (F. DUFOUR/AFP)
 François Hollande le 24 janvier 2012 à Toulon (F. DUFOUR/AFP)

La gauche n’a fait que ce que la droite fait depuis les meetings électoraux de Jacques Chirac. En se donnant des moyens de réalisation audiovisuels haut de gamme, elle sait qu’elle fera des déçus et qu’elle lancera contre elle les élans passionnés des éditorialistes mécontents d’assister à une certaine "mort" du journalisme.

Quand la gauche se donne les moyens

Oui, comme l’expliquait Thomas Legrand dans son éditorial de mardi matin sur France Inter, si les télévisions avaient pu filmer librement, elles auraient capté le regard peut-être grimaçant de Martine Aubry lorsque François Hollande a parlé du pacte de génération. Oui, il est donc là, le journalisme politique, dans la captation des divergences, des dysfonctionnements, du parasitage.

Oui, lorsque Malek Boutih critique une position du Parti socialiste, il fait plus aisément la "une" que lorsqu’un secrétaire national de n’importe quel parti réunit pendant des mois tout ce que la France possède d’experts dans son domaine de compétence. Oui, pouvoir filmer et mettre à l’antenne une grimace, un bâillement, un regard noir… éliminerait toute trace de servitude volontaire. 

S’il ne s’agissait que de cela, nous devrions donc avoir la presse la plus libre et indépendante du monde.

Le coup de sang de Manuel Valls

Pourtant, le meeting de Toulon, organisé mardi pour le même candidat, n’a pas autant fait parler de lui. Moins solennel, moins attendu, moins fourni en militants, tout simplement moins important… et moins mis en scène. Retour au classique : captation libre par les journalistes audiovisuels, chacun se retrouvant libre de filmer les grimaces des uns et des autres. Mais surtout, un résultat si mauvais à l’antenne que Valls et l’équipe de campagne du candidat ont compris l’intérêt d’une captation contrôlée de l’image : grésillements, caméras tremblantes, scène filmée du fond de la salle.

Mes conseils à Manuel Valls étaient inverses : à présent que vous avez élevé le standard, vous ne pouvez plus redescendre. Tout le monde fait comme ça aujourd’hui ; la gauche n’a plus le droit de jouer les amateurs. Le professionnalisme n’est pas réservé à la droite. Le public a apprécié les images de dimanche, qui ont participé du succès et de la présidentialisation du candidat. "Manuel, ne cède pas !"

Le coup de sang de Valls après l’échec formel du meeting de mardi à Toulon devrait, je l’espère, lui permettre de gagner le match qui oppose aujourd’hui les amateurs aux professionnels.

Quant aux commentateurs, qu’ils se rappellent que les campagnes de Mitterrand en 1981 et en 1988, ainsi que de Sarkozy en 2007 ont été parmi les plus esthétiques que la France ait connues.


"Le Conseiller" tient chaque semaine une chronique dans Le Nouvel Observateur intitulée "Le journal du sorcier".